Il semblerait que j’ouvre le bal, voici donc le livre que Crok a choisi de me faire découvrir : En attendant les barbares de JM COETZEE

4ème de couverture :
Dans un désert sans nom et un temps incertain, un magistrat gère un fort qui marque la frontière de l’Empire. Le pouvoir central s’inquiète d’une invasion barbare et dépêche sur les lieux le colonel Joll, un tortionnaire de la pire espèce.
Parmi les hommes et les femmes ramenés au fort et torturés, une jeune fille blessée attire l’attention du magistrat qui finit par partir avec elle. Mais, rejeté par le peuple nomade dont elle est originaire, le magistrat s’en retourne auprès des siens. Accusé de trahison, il va à son tour passer par les mains du bourreau…
Mon avis :
Que de thèmes abordés dans ce livre !
Certains ont plus que d’autres eu un écho en moi mais ils restent tous aussi importants les uns que les autres.
On y retrouve d’abord la sensualité, la sexualité d’un homme d’un certain âge. Une facette de ce personnage principal que l’on va trouvé parfois perverse, profondément machiste mais aussi tellement malheureuse.
On y retrouve ensuite tout ce qui touche à l’étranger, à l’inconnu, à l’Autre si différent mais surtout si semblable. Cet autre que l’on diabolise parce qu’il ne vit pas comme nous, parce qu’il est différent et que la différence nous effraie. Ce besoin qu’éprouve l’Homme de diaboliser, de rendre monstrueux et terrible celui qui lui fait peur, le besoin de se distinguer de l’Autre, de le déshumaniser et de se dire que non, il n’appartient pas vraiment à la race humaine.
Au regard de la profession que je m’apprête à embrasser, profession qui suscite tant d’interrogations chez les autres, « mais comment pourras-tu défendre ces monstres » ce livre m’a énormément parlé. Particulièrement quand, s’élevant contre les bourreaux, le personnage principal, afin de raisonner ceux qui torturent, ceux qui font souffrir de pauvres barbares qui n’avaient comme tort que d’être des barbares, dit ces
mots : « Regardez ces hommes ! Ces hommes ! »
Cette phrase si simple est pourtant celle qui résume tout. Comment vous, être humain pouvez vous infligé la souffrance à vos semblables au nom de ce qui vous semble être votre loi, votre justice ? Et ce personnage principal qui, au nom de ses convictions, au nom de ses idéaux va endurer la souffrance physique, revenir à l’état de bête que l’on veut lui infliger en le battant, le torturant, le privant de nourriture, l’avilissant. Cela renvoie à la pyramide de Maslow, que l’auteur décrit parfaitement.
Ce livre m’a aussi rappelé mes cours d’histoire du droit et de la Justice. Des cours qui m’avaient passionné et qui montraient vraiment cette évolution de la vengeance privée à la Justice que l’on connait aujourd’hui en passant par la torture afin de faire « avouer » une vérité qui parfois n’en est pas une. Je retiens d’ailleurs une phrase de ce livre « En barbare ce caractère veut dire guerre mais il a aussi d’autres sens. Il peut signifier vengeance et si vous le renversez comme ceci, la tête en bas, il peut se lire
justice. » Et effectivement, cette proximité entre la justice et la vengeance, une ligne ténue qui pourtant doit être parfaitement respectée est très bien décrite dans ce livre.
Bref, comme me le disait Crok « Il est très symbolique et il faut prendre le temps de le lire ».
Je pense n’avoir abordé ici qu’une infime partie des messages que l’auteur souhaite transmettre. C’est en tout cas un livre puissant, extrêmement bien écrit que je relirai certainement d’ici plusieurs années pour en découvrir peut être un autre sens.